@Johan Scipion expliquait :
Johan Scipion a écrit : ↑sam. nov. 29, 2025 7:41 pmQui Revient de Loin a écrit : ↑sam. nov. 29, 2025 5:47 pm Il y a suffisamment (une majorité ?) de MJ qui disent aimer/vouloir lire un texte littéraire pour reconnaître que c'est une fonction attendue et légitime.
Et en vérité essentielle. La particularité du scénario rôliste en tant que texte est qu'il doit donner envie d'être joué. Il faut qu'à la lecture, le meneur éprouve le désir de le porter à sa table. Et ce doit être un désir brûlant car le coût et le risque sont élevés. D'une part, la maîtrise est un gros boulot, qui suppose un vrai investissement personnel. D'autre part, s'il y a foirade, le meneur aura pourri sa soirée et celle de ses potes. Qui voudrait gâcher le plaisir de toute une table ?
Y'a pas à tortiller, pour susciter le désir, il faut séduire. Et pour séduire, les modes d'emploi, ça marche moyen. La littérature est nettement plus puissante, mais alors nettement. Parce que pour plaire, jamais tu ne parles le langage de la raison. Tu veux susciter l'émotion, enflammer l'imagination. Ça, un mode d'emploi le fait très mal. Il y a donc une forte tension interne au scénario rôliste en tant que texte car il doit remplir deux fonctions très différentes et passablement antagonistes, susciter l'envie de jouer et servir d'aide de jeu durant la partie. La quadrature du cercle.
Exemple concret. JB m'achète S6. Il s'y trouve Camlann, un scénario arthurien qui, lorsqu'il le lit, lui tape dans l’œil. En tant qu'auteur, je viens de réussir mon jet de séduction. Lucky me, mon texte lui a grave donné envie de le mener. Mais pour le porter à sa table, il doit le décortiquer. Il prend donc des notes (il a montré son aide de jeu dans la vidéo de Vieux Geeks). C'est *exactement* ce qu'on doit faire avec chacun de mes scénarios : le lire avec attention, puis l'annoter. Ce n'est pas pour rien que j'imprime en noir sur blanc, avec des polices ultra lisibles et sans texture de fond. On peut ainsi facilement écrire sur mes zines, les surligner et voir parfaitement le résultat à table, même éclairé à la bougie. Si on est fétichiste du papier et qu'on ne veut pas abîmer sa revue, on prend des notes sur une feuille volante, ce qui revient quasi au même.
Du coup, la question est : pourquoi ne pas fournir d'emblée ce petit résumé technique, de façon à épargner de la peine au meneur ? Après tout, je livre souvent beaucoup d'autres aides de jeu avec mes scénarios. Une de plus, une de moins... Si je ne le fais pas, c'est parce que je pense que ça ne fonctionne pas. Les notes de JB marchent à la table de JB parce que ce sont les siennes. C'est son mode d'emploi à lui pour faire son Camlann à lui. Il va fonctionner du tonnerre à sa table parce qu'il l'a produit lui-même. Peut-être même qu'il ne va pas y jeter un seul coup d’œil durant le jeu car ce qui compte réellement, c'est le travail d'appropriation qu'il a fournit. Prendre des notes lui a mis sa version de Camlann dans la tête.
Tout cela est hyper personnel car chaque meneur a des besoins spécifiques. Vraiment, quand on a le nez dans son guidon (son écran ^^), on ne se rend pas compte à quel point les demandes de chacun sont différentes. Pour ma part, je ne l'ai réellement compris qu'après avoir reçu de très nombreux retours très divergents sur mes textes. Le constat est que jamais ne je pourrai produire une aide de jeu qui réponde aux besoins de chacun. Il n'existe pas de mode d'emploi universel pour mes scénarios. À chaque meneur de faire le taf en sélectionnant dans mon texte les infos qu'il juge utiles.
De mon côté, je m'échine à écrire un texte qui raconte une histoire paralittéraire (ou plus exactement, une potentialité d'histoire, la nuance est cruciale) qui ait les meilleures chances d'accrocher le plus grand nombre. Ça, ça a des chances de marcher.
Qui Revient de Loin a écrit : ↑sam. nov. 29, 2025 9:11 pm @Johan Scipion je pense que tu as, hélas, raison pour ce qui est de la séduction/conviction par l'histoire.
Pourquoi "hélas" ? Parce que cette forme littéraire est en concurrence avec le découpage technique, qu'elle est porteuse de défaut conceptuel (le fameux "Truc impossible avant le petit-déj'") et qu'elle ne facilite pas la nécessaire improvisation qui se produit fatalement.
Je suis moins d'accord sur l'impossibilité de proposer des outils, des ressources de préparation de partie. Certains outils doivent être utilisable par un grand nombre de meneur, il n'y a pas que l'écrit littéraire qui puisse prétendre à une sorte d'universalisme. Ou les cartes/plans géographiques et les tables aléatoires d'ailleurs, qui sont aussi très communs dans les donjonneries.
Les cartes relationnelles par exemple, les listes à cocher (pour les indices par exemples) pourraient y prétendre aussi, et certainement d'autres.
Ce qui fait donc une fonction "Fournir une/des éléments de préparation de partie pour mener le scénario".
Et big up au passage pour ton format zine sur papier non-glacé. Je préfère ça au papier glacé avec fond justement pour prendre des notes (soit dans l'ouvrage, soit sur une reproduction).
Ce qui m'a fait penser aux jeux vidéo en monde ouvert (donc inadaptés à un mode narratif linéaire) :
Qui Revient de Loin a écrit : ↑lun. déc. 01, 2025 1:23 pmJe me pose une question : comment font les jeux vidéo en monde ouvert (et donc souvent sans narration linéaire) pour séduire ? (je n'y joue plus depuis 2004...)Johan Scipion a écrit : ↑sam. nov. 29, 2025 7:41 pmQui Revient de Loin a écrit : ↑sam. nov. 29, 2025 5:47 pm Il y a suffisamment (une majorité ?) de MJ qui disent aimer/vouloir lire un texte littéraire pour reconnaître que c'est une fonction attendue et légitime.
Et en vérité essentielle. La particularité du scénario rôliste en tant que texte est qu'il doit donner envie d'être joué. Il faut qu'à la lecture, le meneur éprouve le désir de le porter à sa table. Et ce doit être un désir brûlant car le coût et le risque sont élevés. D'une part, la maîtrise est un gros boulot, qui suppose un vrai investissement personnel. D'autre part, s'il y a foirade, le meneur aura pourri sa soirée et celle de ses potes. Qui voudrait gâcher le plaisir de toute une table ?
Y'a pas à tortiller, pour susciter le désir, il faut séduire. Et pour séduire, les modes d'emploi, ça marche moyen. La littérature est nettement plus puissante, mais alors nettement. Parce que pour plaire, jamais tu ne parles le langage de la raison. Tu veux susciter l'émotion, enflammer l'imagination. Ça, un mode d'emploi le fait très mal. Il y a donc une forte tension interne au scénario rôliste en tant que texte car il doit remplir deux fonctions très différentes et passablement antagonistes, susciter l'envie de jouer et servir d'aide de jeu durant la partie. La quadrature du cercle.
Est-ce que la comparaison n'est pas pertinente ? (pas de MJ mais des éditeurs et des gamers)
Est-ce que les images animées et la BO d'un teaser ont une puissance de séduction qui transcende la question de la littérature linéaire/non-linéaire ?
Où y a-t-il des choses qui pourraient servir d'inspiration pour cette fonction de "séduction du MJ" ?
zuzul a écrit : ↑lun. déc. 01, 2025 1:55 pmJe pense qu'il y a de multiples facteurs de séduction (graphismes, gameplay, setting) qui vont au delà de la problématique du scénario. Et parlant scénario, des jeux vidéos en monde ouvert que j'ai pu faire, c'est du côté des marches de l'ouest et toute forme de jdr sandbox qu'il y a beaucoup à exploiter : par exemple le Dungeon Masterpiece sur YT fait les parallèles et idées à reprendre avec Skyrim ou Zelda Breath of the Wild.Qui Revient de Loin a écrit : ↑lun. déc. 01, 2025 1:23 pm Je me pose une question : comment font les jeux vidéo en monde ouvert (et donc souvent sans narration linéaire) pour séduire ? (je n'y joue plus depuis 2004...)
Maintenant, il y a quelque chose sur le comment les JV ouverts arrivent à impliquer rapidement un joueur sur une nouvelle quête alors qu'il a déjà 5-10 quêtes actives : je pense ici aux quêtes secondaires de The Witcher 3. Il faudrait revoir les accroches de ces quêtes (genre celle du baron sanglant).
Dany40 a écrit : ↑lun. déc. 01, 2025 4:44 pm Les mondes ouverts en JV fonctionnent beaucoup avec la logique des « points d’intérêt ».
L’idée est de tracer en fait une route que les joueurs vont suivre , mais sans s’en rendre compte.
On les fait bondir d’un point d’intérêt visible qui va les attirer au point suivant qui sera visible lorsqu’ils auront atteint le premier
C’est un système qui peut s’appliquer en JDR
El-Hazzard a écrit : ↑lun. déc. 01, 2025 5:45 pm Cependant (comme l'open-world est devenu quelque chose de très vaste et varié en JV), certains jeux proposent quand même un scénario principal qui exploite le monde ouvert mais tient une forme plus "classique" (pas forcément linéaire, mais sous forme de graphe).
Par exemple The Witcher 3 propose un scénario qui accompagne et guide le jeu, tout en offrant des quêtes, chasses et autres activités "à coté", là où Red Dead Redemption 2 propose justement de naviguer entre points de récit, et les Assassin's Creed récents présentent leurs histoires plus comme des check-lists d'objectifs à atteindre dans n'importe quel ordre (mais avec une logique de niveaux pour guider le parcours).
Pour ces jeux, le teaser et l'image de marque de la série vont être une première approche (comme au cinéma), puis les premières heures de jeu vont souvent être déterminantes (ce qui conduit parfois les studios à extrêmement travailler le début du jeu... et parfois bâcler la fin). C'est sur le temps long que l'intrigue et la manière de la présenter vont avoir leur importance, et laisser un souvenir plus ou moins mémorable (comme la fin très forte de RDR2 à coté de la conclusion de quête principale très tiède de Skyrim).





